5 Novembre 2020
TRIBUNES
Reconfinement : les âmes se rebellent
Xavier Patier - Publié le 04/11/20
L’ablation, au printemps, avait été brutale : les chirurgiens de la présidence de la République avaient amputé la France d’un morceau de son âme pour sauver son corps. Plus de librairies, plus de messes, plus de visites aux anciens, plus de célébrations des morts. C’était le prix à payer pour ne pas mourir, paraît-il. On nous expliquait qu’il fallait renoncer à vivre pour survivre. Ce n’était pas un programme exaltant ; cependant les Français, sidérés et dociles, avaient obéi. Et voilà que l’opération a raté : il faut recommencer. Il faut revenir sur le billard, sous le regard des mêmes chirurgiens qui n’ont presque rien perdu de leur aplomb et presque tout de leur crédit. En juin, le Pr Delfraissy déclarait qu’un nouveau confinement ne serait « ni possible, ni souhaitable ». Il ne le dit plus. Le malade est-il encore opérable ? On en doute. Les Français se réfugient dans une attitude nouvelle, celle du « on nous a déjà fait le coup ». L’innocence du premier confinement est morte. L’orage gronde.
Il est vrai que l’accalmie de la diffusion du coronavirus, présentée en juin comme la victoire de la politique sur la nature, n’était finalement, semble-t-il, qu’une victoire du printemps sur la pandémie. Le retour de l’automne, confinement ou pas, procès-verbaux ou pas, comité scientifique ou pas, a marqué inévitablement le retour du virus. C’est une vieille loi : la grippe espagnole, la grippe asiatique, la grippe de Hong Kong, toutes les pandémies virales rebondissent à l’automne dans l’hémisphère nord. Tout se passe comme si un virus sans vaccin trouvait toujours son chemin : les politiques peuvent dévier un instant sa trajectoire, négocier des délais de répit, l’éclipser en trompe-l’œil, soulager pendant quelques semaines, au prix d’efforts surhumains, les services de réanimation de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris ; à la fin, le virus fait sa route.
Protéger nos âmes, ce serait d’abord admettre que le livre, la musique, la divine liturgie, le culte en général, les moments d’amitié, les exercices de contemplation de la beauté que proposent nos artistes, soient des activités tout autant « essentielles » que l’achat d’un kilo de macaronis ou d’un pack de bière.
Ce n’est pas le comité scientifique qui nous l’enseigne, mais simplement l’Histoire. Le nouveau est que nous n’acceptons plus d’être dépassés. L’homme se veut maître de tout ; il n’accepte pas l’idée d’une catastrophe dont il ne serait pas lui-même la cause. Bientôt on nous dira que si le virus se répand aussi vite, c’est parce que les décrets n’ont pas été bien rédigés. Mais le Parlement aura beau voter beaucoup de lois (il ne sait rien faire d’autre) et le gouvernement rédiger beaucoup de décrets, la vie et la mort suivront leur cours imperturbablement. À la fin, on ne trouvera guère de différence entre la Norvège, qui a confiné tôt et masqué sa population, et la Suède, qui ne l’a pas fait.
Dans ces conditions, nous nous prenons à rêver que la Puissance publique, qui met tant de zèle à nous forcer à protéger nos corps, en mette un peu à protéger nos âmes. Nos âmes ne sont pas moins menacées que nos corps, ces temps-ci. Elles sont en première ligne. Mais qui s’intéresse à nos âmes ? Elles n’ont pas les professeurs de l’Assistance publique, ni les syndicats pour les défendre.
Protéger nos âmes, ce serait d’abord admettre que le livre, la musique, la divine liturgie, le culte en général, les moments d’amitié, les exercices de contemplation de la beauté que proposent nos artistes, soient des activités tout autant « essentielles » que l’achat d’un kilo de macaronis ou d’un pack de bière. Les Belges l’ont compris, qui ont laissé ouvertes leurs librairies. « La culture a un rôle énorme à jouer » résume le vice-Premier ministre Georges Gilkinet. Nos ministres ne sont pas de son avis. La seule chose qui semble compter à leurs yeux, c’est le ventre des Français. Pas les repas partagés entre amis au restaurant : popotte chez soi, en solitaire, debout dans la cuisine. L’ingestion. Cela vient de loin : il y a vingt ans, la télévision nationale multipliait les émissions littéraires. Il y a dix ans, la même télévision, fâchée avec les livres, débordait d’érotisme. C’était affligeant, mais il subsistait dans cet étalage de chairs l’impression qu’un désir d’amour véritable nous guidait encore, mystérieusement, vers un horizon lointain et lumineux, vers un autre monde de pureté et d’absolu.
Cependant, depuis dix ans l’érotisme a pratiquement disparu de nos écrans : il a cédé la place aux leçons de cuisine. La cuisine, les leçons de cuisine, les concours de cuisine, les fêtes de la cuisine : il n’y a plus que des cuistots sur toutes les chaînes. Nos ministres, qui semblent s’être formés par la contemplation assidue des écrans de télévision, ne pensent qu’à la cuisine, quand il s’agit de définir ce qui est « essentiel ». L’identité de la France, selon eux, c’est la cuisine qu’on fabrique soi-même. Tous chefs ! Ils finissent par là où Qohélet (l’Écclésiaste) commence : « Il n’est de bonheur pour l’homme qu’à manger et à boire » (Qo 2, 24). Mais Qohélet avance et eux en restent là.
Il faut les mettre en garde, car les Français de l’automne 2020 ne sont pas ceux du printemps. Ils ne voudront pas se laisser abuser une seconde fois. Ils savent que l’homme ne vit pas seulement de pain. Ils ont faim de culture. Pour des milliers d’entre eux, aussi, faim de pain eucharistique. Les maires ruraux, en grand nombre, expriment leur révolte en prenant des arrêtés pour sauver la vie dans les centres bourgs. Il serait dangereux de prendre à la légère cette sourde protestation contre le matérialisme, montée du plus profond du vieux pays.
Interdiction des messes : cinq questions sur les recours devant le Conseil d’Etat
Agnès Pinard Legry - Publié le 03/11/20
Maître Henri de Beauregard a lui-même déposé deux référés dont un au nom des initiateurs de la pétition en ligne « Pour la messe ». Des communautés et instituts catholiques, dont la Fraternité Saint-Pierre, ont également déposé un recours en référé-liberté. « Je pense qu’il y en a une dizaine mais on pourrait en imaginer presque autant qu’il y a de personnes qui s’opposent à cette mesure », précise à Aleteia Henri de Beauregard. « Cette diversité tient au fait que chacun veut être maître de sa propre argumentation mais elle tient aussi aux sensibilités de chacun. Par ailleurs, le temps ne nous a pas permis de mettre en place une concertation ».
QUELS SONT LES ARGUMENTS AVANCÉS PAR LES REQUÉRANTS ?
Pour le président de la CEF, le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, « porte atteinte à la liberté de culte qui est l’une des libertés fondamentales dans notre pays ». Il estime ainsi « hors de proportion l’interdiction de célébrer la messe et d’autres sacrements en communauté » et rappelle que pour les fidèles, « ces célébrations sont vitales parce qu’elles sont une rencontre avec le Seigneur et avec leurs frères ».
« Alors que le gouvernement a décidé de reconfiner les Français face à la situation sanitaire, nous déplorons que les catholiques ne puissent se rendre librement à la messe », ont pour leur part déploré d’autres évêques ayant également déposé un référé-liberté. « Alors même que les écoles, les grandes surfaces et les transports en commun resteront ouverts, il apparait que la liberté de culte n’est pas respectée ». Ils ont également rappelé que depuis le début de la pandémie de Covid-19, « l’Église s’est toujours montrée irréprochable et toutes les mesures de précaution nécessaires ont été prises et respectées par les prêtres et les fidèles ».
QUAND SERONT-ILS EXAMINÉS ?
Les requêtes déposées sont d’abord transmises aux services du ministère de l’Intérieur, au ministère de la Santé et au Premier ministre. Ces derniers ont ensuite un délai de trois jours pour faire des observations, puis le Conseil d’État fixe une date d’audience pour en discuter. Dans le cas présent, l’audience a été fixée au jeudi 5 novembre.
QUAND EST-CE QUE LA DÉCISION SERA CONNUE ?
« La décision est connue généralement un ou deux jours après l’audience », précise Maître Henri de Beauregard. Une fois que le juge des référés a rendu sa décision il y a un délai minimum prévu pour organiser ou mettre en place d’autres solutions. En mai 2020 le Conseil d’État avait ainsi laissé huit jours aux autorités afin de prévoir de nouvelles modalités pour la réouverture du culte. « Il se peut que la décision soit rapide mais pas immédiate », explique encore l’avocat. À noter qu’il n’y a pas d’appel possible, le Conseil d’Etat étant la plus haute juridiction française.
QUELLE EST L'ISSUE PROBABLE DE CETTE PROCÉDURE ?
Mi-mai le Conseil d’État avait ordonné au gouvernement de lever l’interdiction « générale et absolue » de réunion dans les lieux de culte et avait donné huit jours à l’État pour la mettre en œuvre. Mais cette fois-ci la dynamique est différente. « En mai nous étions dans une dynamique de dé confinement tandis qu’aujourd’hui nous sommes dans une dynamique de reconfinement », prévient Maître Henri de Beauregard. « Je ne suis pas épidémiologiste et de ce point de vue là on attend les éléments avancés par le ministère, la courbe épidémiologique. Pour autant, en dehors de cet élément les arguments sont sensiblement les mêmes », reconnaît-il. « Comme c’est une appréciation de proportionnalité entre une décision d’interdiction et l’objectif sanitaire poursuivi, la proportion peut varier en fonction de l’évolution de la situation ».
Interdiction des messes : l’audience fixée au 5 novembre
Agnès Pinard Legry - Publié le 03/11/20
C’est une décision attendue. L’audience pour examiner les recours en référé-liberté contre l’interdiction des messes décrétée par le gouvernement dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid-19 a été fixée par le Conseil d’État au jeudi 5 novembre. L’information a été confirmée par Maître Henri de Beauregard qui représente les requérants de la pétition en ligne « Pour la messe », lancée dès le 30 octobre. Cette pétition a déjà recueilli 70.000 signatures.
Outre le recours déposé par « Pour la messe », les évêques de France et d’autres associations ou instituions catholiques se sont également mobilisés. Archevêque de Reims et président de la Conférence des évêques de France (CEF), Mgr Éric de Moulins-Beaufort a annoncé ce lundi 2 novembre, après consultation de tous les évêques de France réunis en Assemblée plénière, qu’il allait également en déposer un, estimant ainsi « hors de proportion l’interdiction de célébrer la messe et d’autres sacrements en communauté ».
Un peu plus tôt dans la journée de ce lundi cinq évêques, – Mgr Dominique Rey, Mgr Marc Aillet, Mgr Jean-Pierre Cattenoz, Mgr David Macaire et Mgr Bernard Ginoux – ont également déposé un référé devant le Conseil d’État contre l’interdiction des messes décrétée par le gouvernement. Un recours déposé conjointement avec d’autres associations catholiques : les Associations Familiales Catholiques (AFC), Anuncio, Le Village de François, Journées Paysannes, l’IRCOM et Les Deux Rives.
Messe, mariage, enterrement... tout ce qui sera possible
Caroline Becker - Mathilde de Robien - Publié le 30/10/20
OUI, les messes pour la fête de la Toussaint, célébrée ce dimanche 1er novembre, seront bien maintenues, a précisé le ministère de l’Intérieur. Les catholiques pourront ainsi se rendre durant tout le week-end aux messes organisées par leur paroisse.
OUI, après une première annonce du gouvernement indiquant que les messes publiques seraient suspendues après la Toussaint, le décret sur les mesures mises en place face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire publié le 29 octobre précise que les dispositions de l’article 47 – celui sur les cultes – entrera finalement en vigueur qu’à compter du 3 novembre 2020. Les catholiques pourront donc bien assister, non seulement à la messe de la Toussaint dimanche 1er novembre, mais aussi à celle du lundi 2 novembre afin de prier pour les défunts.
A partir du 3 novembre, toutes les messes publiques seront suspendues jusqu’au 1er décembre. Si elles seront bien célébrées par des prêtres en privé, les fidèles ne pourront pas y assister physiquement. Dès que cette suspension sera en vigueur, Aleteia proposera à ses lecteurs des célébrations de la parole. Les paroisses devraient également proposer de suivre des messes en direct par vidéo, comme lors du premier confinement.
OUI, les lieux de cultes resteront ouverts au public mais les grands rassemblements y sont interdits à partir du 3 novembre. Les fidèles pourront ainsi venir se recueillir dans les églises pour effectuer des prières individuelles ou déposer des cierges.
LES MESSES QUOTIDIENNES ET HEBDOMADAIRES SONT-ELLES MAINTENUES ?
NON, les églises ne pourront plus accueillir de cérémonies religieuses à partir du lundi 2 novembre, sinon avec des effectifs extrêmement réduits. Les célébrations de première communion qui étaient prévues après le 2 novembre sont soient avancées de manière exceptionnelle, ou reportées. Là encore, les paroisses sont donc invitées à organiser des messes en direct, retransmises par vidéo, tout au moins pour la messe dominicale.
OUI, jusqu’au dimanche 1er novembre, les cimetières seront accessibles pour permettre au catholiques de se recueillir auprès de leurs défunts. Les fleuristes resteront également ouverts exceptionnellement jusqu’à dimanche soir pour fleurir les tombes. Suite au week-end de la Toussaint, les cimetières resteraient ouverts. Si les rassemblements ne sont pas autorisés, il sera cependant toujours possible d’enterrer les morts dignement, a annoncé Emmanuel Macron, sans donner plus de détails.
OUI, si les rassemblements et cérémonies sont, de manière générale interdits, les mariages à l’église demeurent cependant autorisés mais sont limités à 6 personnes maximum. Le temps des mariages en comité (très) restreint est donc de retour.
DANS QUELLES CONDITIONS LES ENTERREMENTS AURONT-ILS LIEU ?
Lors du précédent confinement, les obsèques étaient limitées à 20 personnes. Cette fois, la jauge est un peu plus élevée : 30 personnes seront autorisées à accompagner un défunt dans sa dernière demeure.
Renseignez-vous auprès de votre paroisse pour connaître les modalités des confessions si confessions il y a. Durant le premier confinement, les prêtres n’ont pas manqué d’imagination afin de donner le sacrement de Réconciliation : à travers une vitre en plexiglas ou encore en drive confession. Si les confessions ne sont pas prévues dans votre paroisse, rappelez-vous ce que le pape François avait déclaré, lors de son homélie du 20 mars dernier : « Si tu ne trouves pas un prêtre pour te confesser, parle à Dieu, il est ton père, et dis-lui la vérité : « Seigneur, j’ai fait ceci, cela, cela … Pardonne-moi », et demande-lui pardon de tout mon cœur, avec l’Acte de contrition et promets-lui : « Je me confesserai plus tard, mais pardonne-moi maintenant ». Et immédiatement, vous reviendrez à la grâce de Dieu. Vous pouvez vous-même approcher, comme le Catéchisme nous l’enseigne, le pardon de Dieu sans avoir un prêtre à portée de main. Pensez-y : c’est le moment ! Et c’est le bon moment, le moment opportun. Un acte douloureux bien fait, mais qui fera que notre âme deviendra blanche comme neige ».
Pascal Deloche / Godong - Célébration de la messe de Pâques a la collégiale Saint-Jacques de Sallanches.
Le premier jour du reconfinement spirituel
Agnès Pinard Legry - Publié le 02/11/20
Confinement, deuxième round. Si la mise en place d’un couvre-feu le 17 octobre avait déjà commencé à perturber l’organisation des paroisses, les curés se voulaient plutôt rassurants, mettant volontiers en avant leur expertise du précédent confinement ainsi que les nombreuses possibilités que cette mesure laissait encore aux églises. Mais l’annonce par Emmanuel Macron d’un reconfinement mercredi 28 octobre a bel et bien achevé de bouleverser la vie paroissiale.
La suspension des messes publiques dès le 3 novembre est la mesure la plus douloureuse à mettre en place pour les catholiques. « C’est une souffrance pour beaucoup de catholiques de ne plus pouvoir participer à la messe pendant ce mois de novembre », explique ainsi l’archevêque de Rennes, Mgr Pierre d’Ornellas. « Ils y puisent la force de l’espérance ». Une souffrance à laquelle les fidèles avaient déjà dû faire face lors du précédent confinement et à laquelle ils ont répondu avec beaucoup d’ingéniosité. On a vu se multiplier, partout en France, les messes diffusées en direct sur Facebook, l’application Zoom ou encore YouTube. D’autres ont privilégié les célébrations de la Parole de Dieu à la maison proposées par Aleteia. D’autres, enfin, ont préféré suivre la messe à la télévision. Les paroisses disposant déjà d’une expertise vont donc, pour ce deuxième confinement, se redéployer une nouvelle fois virtuellement, comme l’ont déjà annoncé beaucoup de curés ce week-end.
Pour autant, de nombreux fidèles sont bien décidés à ne pas être privés de messe durant ce deuxième confinement. Une pétition pour demander l’autorisation des messes publiques circule sur Internet depuis ce vendredi 30 octobre. En trois jours, plus de 65.000 signatures ont été recueillies. En parallèle, des communautés et instituts catholiques, dont la Fraternité Saint-Pierre, ont annoncé dès le 30 octobre le dépôt d’un recours en référé-liberté devant le Conseil d’État contre l’interdiction des messes décrétée par le gouvernement.
Président de la Conférence des évêques de France (CEF) et archevêque de Reims, Mgr Éric de Moulins-Beaufort a annoncé ce lundi 2 novembre, après consultation de tous les évêques de France réunis en Assemblée plénière, qu’il allait déposer un référé liberté au Conseil d’État. En effet, d’après l’épiscopat français, « le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, porte atteinte à la liberté de culte qui est l’une des libertés fondamentales dans notre pays ». Les évêques de France estiment ainsi « hors de proportion l’interdiction de célébrer la messe et d’autres sacrements en communauté ».
Toujours ce lundi 2 novembre, cinq évêques de France, Mgr Rey (évêque de Fréjus-Toulon), Mgr Aillet (évêque de Bayonne), Mgr Cattenoz (évêque d’Avignon), Mgr Macaire (évêque de Fort-de-France) et Mgr Ginoux (évêque de Montauban) ont également annoncé en avoir fait autant : « Alors même que les écoles, les grandes surfaces et les transports en commun resteront ouverts, il apparait que la liberté de culte n’est pas respectée », dénoncent-ils. « Comme en mars, la logique du gouvernement a été de n’autoriser que les seules activités jugées ‘essentielles’. Mais cela soulève une réelle difficulté car cette notion d’’activité essentielle’ est éminemment subjective (et non juridique) » décryptait il y a quelques jours Maître Jean-Baptiste Chevalier, dans Aleteia.
Mais si les messes publiques sont suspendues, les églises restent néanmoins ouvertes à chacun pour la prière personnelle ou déposer des cierges. Ceux qui désirent se confesser devraient aussi pourvoir le faire, en fonction des dispositions prises par chaque paroisse. Concernant les mariages, ils restent possibles à l’église mais limités à six personnes. Concernant les obsèques, la jauge est un peu plus élevée : 30 personnes seront autorisées à accompagner un défunt dans sa dernière demeure.
Au-delà des messes et autres sacrements, c’est l’ensemble de la pastorale d’une paroisse qui se trouve bouleversée. Préparation au baptême, au mariage, catéchuménat, parcours Alpha, soirées de louange… Là encore, certaines églises avaient déjà ‘virtualisées’ leurs rendez-vous lors du précédent confinement. Elles devraient une nouvelle fois le faire afin de permettre à ceux qui le désirent de se nourrir spirituellement. À Grenoble, c’est l’option choisie par l’église saint-Joseph pour ses soirées F-E-U (Foi, Enseignement, Unité) qu’il sera possible de suivre le mercredi en ligne avec Facebook Livre de 20h30 à 21h15. À Séez, dans l’Orne, le diocèse vient de réactiver sa chaîne Youtube : le 11 novembre à 20h30 devrait avoir lieu un premier topo-conférence animé par l’évêque, Mgr Habert, suivi d’un échange avec les internautes. D’autres ont préféré reporté ces temps d’enseignement à décembre (une date susceptible d’évoluée en fonction de l’évolution de la situation sanitaire, ndlr).
D’autres activités comme le scoutisme, en lien avec celles des paroisses, sont perturbées. « Il n’y a plus d’activités scoutes ni de formations en interne en présentiel », assure Agnès Cerbelaud, responsable de la communication chez les Scouts et Guides de France (SGDF). Si elle note que la situation peut évoluer dans les prochaines semaines, « là, maintenant, ce n’est pas possible », reconnaît-elle. Là encore, si les sorties et activités sont suspendues en raison de l’épidémie de covid-19, l’engagement scout est bel et bien ancré dans le quotidien de chacun. « Le confinement permet de vivre le scoutisme autrement », assurait à Aleteia frère Nicolas Burle, dominicain et aumônier national des Scouts unitaires de France (SUF), en mars 2020. « Cette période est bien évidemment frustrante. Mais je trouve qu’il y a quelque chose à vivre. C’est comme ça, donc gérer la frustration ‘de manière scoute’ c’est sourire et se dire : « On va vivre l’aventure autrement, on va le faire autrement ». C’est une occasion de reproduire le miracle de Cana : soit je transforme chaque journée en vin extraordinaire, c’est-à-dire en amour, soit en vinaigre. Quand on est scout on aime car on est posé radicalement face au choix auquel nous engage notre promesse. »
Coronavirus : comment communier sans aller à la messe ?
Agnès Pinard Legry - Publié le 06/03/20
Alors que la France compte pour le moment plus de 400 cas confirmés de coronavirus et sept décès, plusieurs mesures ont été prises par le gouvernement et certains diocèses, les plus touchés, pour prévenir la propagation de l’épidémie. Les catholiques de l’Oise et du Morbihan vont ainsi être privés de messe ce dimanche 8 mars. Mais ils ne sont pas privés pour autant de communion spirituelle.
Également appelée « communion de désir », la communion spirituelle est la « communion au Christ présent dans l’Eucharistie, non pas en le recevant sacramentellement, mais par le seul désir procédant d’une foi animée par la charité », rappelle l’Église catholique. « La valeur de la communion spirituelle repose sur la foi en la présence du Christ dans l’eucharistie comme source de vie, d’amour et d’unité ». La communion spirituelle est un moyen privilégié « de s’unir au Christ » pour ceux qui ne peuvent pas communier corporellement.
Mgr Centène, évêque de Vannes, a ainsi rédigé un acte de communion spirituelle pour les catholiques qui ne pourront se rendre physiquement à la messe ce dimanche :
« Seigneur Jésus, je crois fermement que Tu es présent dans le Saint Sacrement de l’Eucharistie. Je T’aime plus que tout et je Te désire de toute mon âme.
« Après toi languit ma chair comme une terre assoiffée » (psaume 62) Je voudrais Te recevoir aujourd’hui avec tout l’amour de la Vierge Marie, avec la joie et la ferveur des saints. Puisque je suis empêché de Te recevoir sacramentellement, viens au moins spirituellement visiter mon âme. En ce temps de carême, que ce jeûne eucharistique auquel je suis contraint me fasse communier à Tes souffrances et surtout, au sentiment d’abandon que Tu as éprouvé sur la Croix lorsque Tu t’es écrié : « Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ».
Que ce jeûne sacramentel me fasse communier aux sentiments de Ta Très Sainte Mère et de Saint Joseph quand ils T’ont perdu au temple de Jérusalem, aux sentiments de Ta Sainte mère quand elle Te reçut, sans vie, au pied de la Croix. Que ce jeûne eucharistique me fasse communier aux souffrances de Ton Corps mystique, l’Église, partout dans le monde où les persécutions, ou l’absence de prêtres, font obstacle à toute vie sacramentelle. Que ce jeûne sacramentel me fasse comprendre que l’Eucharistie est un don surabondant de Ton amour et pas un dû en vue de mon confort spirituel. Que ce jeûne eucharistique soit une réparation pour toutes les fois où je T’ai reçu dans un cœur mal préparé, avec tiédeur, avec indifférence, sans amour et sans action de grâce. Que ce jeûne sacramentel creuse toujours davantage ma faim de Te recevoir réellement et substantiellement avec Ton corps, Ton sang, Ton âme et Ta divinité lorsque les circonstances me le permettront. Et d’ici là, Seigneur Jésus, viens nous visiter spirituellement par Ta grâce pour nous fortifier dans nos épreuves. Maranatha, viens Seigneur Jésus. »
Plus globalement, s’il n’y a pas de ‘méthode’ absolue, l’Église recommande de faire les mêmes actes que ceux qui sont indiqués avant et après la Communion : l’acte de contrition, l’acte de foi vive, qui nous représente Jésus-Christ victime immolée pour nous, l’acte de désir, celui de nous unir à Jésus dans le Sacrement si c’était possible, l’acte de demande, « qui nous fait implorer les Grâces qui sont promises à ceux qui se nourrissent de l’Eucharistie », et, enfin, l’acte d’action de grâces.
Coronavirus : priés de célébrer la messe seuls, des prêtres témoignent
Bérengère Dommaigné - Publié le 03/03/20
Dans le département de l’Oise, comme dans celui du Morbihan, les arrêtés préfectoraux interdisent les rassemblements de plus d’une centaine de personnes, dans un lieu confiné, jusqu’au 14 mars prochain. Si, pour le diocèse de Vannes, ce sont toutes les messes qui sont suspendues, dans le diocèse de Beauvais, ce sont uniquement les messes dominicales. Celles en semaine, qui accueillent en général une vingtaine de fidèles, sont maintenues. Dans ces deux diocèses, les messes d’obsèques et de baptêmes peuvent toujours avoir lieu mais seules les familles et les proches sont invités à y assister. Des décisions difficiles à prendre, qui provoquent parfois l’incompréhension ou même l’agacement.
Il faut donc continuer à vivre, ne pas être habité par la peur mais par l’Amour »
Le père Séraphin Yannogo, curé à la cathédrale de Senlis, a donc dit la messe seul dimanche dernier. Il s’est installé dans la chapelle préromane de la cathédrale. « Nous avions mis une grande affiche sur la porte indiquant à ceux qui se présentaient qu’il n’y avait pas de messe mais que nous les invitions à prier chez eux avec la parole de Dieu. Une façon de rappeler que c’est aussi une nourriture ! »
Mais quelle impression pour un prêtre de vivre une messe dominicale tout seul ? « C’est la première fois que cela m’arrive, c’est vrai que cela fait drôle, mon cœur de prêtre était touché de ne pas être avec mes fidèles. En même temps, je sais que la parole de Dieu est là et qu’elle nous nourrit tous. Humainement parlant, on pourrait être triste… mais nous sommes chrétiens, nous avons le Christ avec nous, alors on ne s’arrête pas à ces désagréments ! » Et de raconter un petit clin-Dieu : « Je n’ai donc pas pu dire l’homélie que j’avais préparée quelques jours avant l’annonce de suspension de la messe dominicale, or il se trouve que mon homélie portait justement sur l’importance de la parole de Dieu, une parole qu’il faut « ruminer », afin de la laisser agir au plus profond de nous ». « Il faut donc continuer à vivre, ne pas être habité par la peur mais par l’Amour », conclut le prêtre, toujours plein d’entrain.
Ce qui me frappe aussi, c’est cette concomitance avec le Carême, cela nous invite à prier davantage, en communion avec les autres et à se convertir.
À Vannes, le père Jean-Baptiste Nadler raconte également comment, devant la centaine de fidèles de la messe de semaine de lundi, il a du annoncer au micro que l’office n’aurait pas lieu. « C’était un moment fort de ma vie de curé, nous avons pu discuter et expliquer les consignes et la démarche. Avant tout, nous devons prier et prendre soin des autres ! Tout cela sans peur, sans suspicion et sans complotisme ! Je comprends l’inquiétude ou l’incompréhension de certains paroissiens, mais c’est une épreuve que l’on doit vivre humblement. Ce qui me frappe aussi, c’est cette concomitance avec le Carême, cela nous invite à prier davantage, en communion avec les autres et à se convertir. Voila notre chemin en tant que chrétiens ». « En tant que curé, oui c’est dur, mes paroissiens me manquent ! J’aime prier avec eux, c’est quand même le cœur de ma vie et de ma mission ! Mais aujourd’hui, en disant la messe seul, à l’heure du déjeuner, j’ai prié pour chacun d’entre eux, demandant au Seigneur de nous unir par la prière et par la communion spirituelle ».
C’est l’occasion de réfléchir à notre rapport à l’Eucharistie. Sur quoi fondons-nous notre foi ?
Le Père Guillaume Deveaux, vicaire épiscopal et curé de Crépy-en-Valois, désormais célèbre pour être le foyer de l’épidémie, tient aussi à rappeler comme il est difficile pour un évêque de prendre une telle décision. « C’est un crève-cœur, une souffrance, pour l’évêque, pour tous les prêtres du diocèse et aussi pour tous nos paroissiens. Comment le critiquer dans sa décision ? Laquelle serait la bonne ou la moins mauvaise possible ? », s’interroge alors le père Guillaume qui raconte à son tour, comment cette situation inédite doit être vécue spirituellement et au delà des recommandations sanitaires. « C’est l’occasion de réfléchir à notre rapport à l’Eucharistie. Sur quoi fondons-nous notre foi ? » Et d’ajouter, plein d’espérance, « l’Église nous enseigne que dans tout mal peut jaillir la lumière, je pense que nous sommes dans cette situation qui va nous permettre à tous, chrétiens, d’avancer spirituellement et dans la fraternité ».
À son tour, le Père Guillaume témoigne de certaines réactions qui le touchent. « Plusieurs paroissiens sont venus me dire à quel point ils étaient profondément blessés de ne pouvoir communier. Pour un prêtre, c’est très fort et très beau d’entendre cela. Moi qui ait donné ma vie pour suivre le Christ et le célébrer, je réalise comme les gens ont besoin du Christ ». Cette semaine, le curé de Crépy-en-Valois célèbrera une messe par jour, tous les soirs à 18h30, précédée d’une heure d’adoration. Et pour dimanche prochain, le 8 mars, « l’évêque donnera les consignes vendredi, les décisions se prennent semaine par semaine… ». De l’avis unanime de ces curés éloignés physiquement de leurs paroissiens, la prière commune et la communion spirituelle sont indispensables en ces temps difficiles, tout comme ce chemin de carême qui est plus que jamais d’actualité.
Agnès Pinard Legry - Publié le 03/03/20
« Toutefois, nous connaissons la puissance de la foi et de la prière pour surmonter les difficultés », a rappelé l’évêque. Dans le passé, confrontés à des situations similaires ou pires, « nos pères se sont tournés avec confiance vers la Très Sainte Vierge Marie, invoquée sous les noms de Notre-Dame-du-Vœu à Hennebont ou Notre-Dame-de-Joie à Pontivy ». Au XVIIᵉ siècle l’abbé Claude Marquet, curé de Pontivy, a invoqué Notre-Dame-de-Joie afin de protéger les habitants de la ville menacés par une épidémie. « À sa prière la population de Pontivy fut préservée », rappelle ainsi Mgr Centène.
Bérengère Dommaigné - Publié le 02/03/20
C’est sur le célèbre Padreblog que l’abbé Pierre Amar, prêtre du diocèse de Versailles, propose une réflexion en rebond aux différentes mesures mises en place par les diocèses de France pour limiter et prévenir l’épidémie du coronavirus. S’il devient impossible d’assister à la messe, comme c’est déjà le cas dans de nombreux pays d’Asie, depuis plusieurs semaines maintenant, et en Italie, n’est-ce pas l’occasion de réfléchir au sens de la communion sacramentelle et de (re)découvrir ce qu’est la communion spirituelle ? Car comme le souligne l’abbé Amar, « la communion n’est pas un dû, mais un don ».
« Lorsqu’on en est empêché pour différentes raisons, l’Église a toujours encouragé ce qu’elle appelle la communion spirituelle » rappelle-t-il dans un long texte publié dimanche soir. Et force est de constater qu’aujourd’hui dans le monde, de très nombreux chrétiens vivent au quotidien cette communion spirituelle, que ce soient ceux qui sont persécutés pour leur foi et doivent se cacher, ou les nombreux malades qui n’assistent à la messe que derrière un écran de télévision. N’est-ce pas alors l’occasion de se rapprocher de tous ces chrétiens en vivant à notre tour cette communion spirituelle, dite aussi communion de désir ? Une communion de désir qui se vit à travers cette jolie prière :
« Puisqu’il ne m’est pas donné de te recevoir dans cette hostie Seigneur, je te sais assez puissant pour que tu te donnes à moi autrement. Mon cœur te désire, Viens, Seigneur ! Amen. »
Bérengère Dommaigné - Publié le 02/03/20
« Une église n’est pas un lieu à risque, mais un lieu de salut ». C’est sur le site internet du diocèse de Belley Ars que Mgr Pascal Roland, l’évêque des lieux, invite ses paroissiens à ne pas céder à la peur ambiante, se refusant à mettre en place des mesures particulières. Tous les rassemblements prévus dans le diocèse dans les semaines à venir sont donc maintenus. « Je n’entends pas édicter de consignes particulières pour mon diocèse : les chrétiens vont-ils cesser de se rassembler pour prier ? Vont-ils renoncer à fréquenter et à secourir leurs semblables ? Hormis les mesures de prudence élémentaire que chacun prend spontanément pour ne pas contaminer les autres lorsqu’il est malade, il n’est pas opportun d’en rajouter », indique clairement l’évêque, estimant qu’en oubliant la dimension spirituelle de notre être, « nous perdons pied ».
L’évêque s’étonne par ailleurs de cette « épidémie de peur » rappelant le nombre importants de morts chaque année dû à la grippe saisonnière, mais aussi à l’alcool ou encore au tabac, sans qu’aucune mesure aussi restrictive ne soit jamais prise. « Loin de moi donc, l’idée de prescrire la fermeture des églises, la suppression de messes, l’abandon du geste de paix lors de l’Eucharistie, l’imposition de tel ou tel mode de communion réputé plus hygiénique (ceci dit, chacun pourra toujours faire comme il voudra !) » Il n’y a donc pas de peur à avoir, « car un chrétien ne craint pas la mort. Il n’ignore pas qu’il est mortel, mais il sait en qui il a mis sa confiance ». « Le chrétien apprend à se donner généreusement au service de ses frères les plus fragiles, dans la perspective de la vie éternelle ».